Licenciée en peinture et tapisserie contemporaine par la Faculté des Beaux-Arts de Lisbonne, Sónia Aniceto part à Bruxelles, avec une bourse Erasmus, pour une formation dans l'atelier de tapisserie de l’Académie Royale des Beaux-Arts, en 2000.    L'artiste s'installe alors dans cette ville européenne pour y suivre un post-diplôme, un DEA en «Art Actuel», intégrer des résidences dans des centres culturelles et travailler aux ateliers de décors de L’Opéra Royal de la Monnaie. Parallèlement à sa carrière artistique, elle prend également une voie pédagogique.

En plus d'être enseignante en arts plastiques et décoration, Sónia travaille pour MUS-E comme artiste invitée, pour réaliser des projets d’arts plastiques dans des écoles bruxelloises.

En tant qu'artiste plasticienne, sa carrière se développe en Belgique, aux Etats Unis, au Portugal, en France et en Allemagne où l'artiste se fait représenter par plusieurs galeries. Son travail intègre des collections publiques et privées.


SONIA ANICETO, Peaux Rebelles

  C’est à travers ses techniques personnelles en perpétuelle évolution que Sónia Aniceto cultive son propre langage plastique, poétique et singulier.

Dans ses œuvres récentes, l’artiste s’abandonne au plaisir de l’expérimentation. A la constante recherche  de dialogue entre peinture et broderie, s’invite un nouveau support : le « drop paper ». Un papier très fibreux qui apprivoise les cicatrices et les tensions produites par les points de couture. Strate après strate, le fil  transforme le papier en tissus. Plus organique et modulable, cette nouvelle matière ouvre le chemin à la tri-dimensionnalité. L’aiguille n’est plus utilisé comme un crayon mais comme un métier à tisser, créateur de nouvelles « peaux » qui se rebellent jusqu’à s’extirper du papier.

Ces œuvres sur papier se dotent alors d’une vie propre: le point libre de la machine façonne ses courbes et ses plis au gré du mouvement.
Le dessin s’adapte et l’artiste s’amuse du caractère aléatoire. Ses interventions brodées sur le support des
siné magnifient l’image. Parfois discrètes, presque insaisissables. Et à d’autres moments, omniprésentes. La machine s’affole et ponctue le papier de gesticulations furieuses, de boucles folles qui recouvrent et  envahissent le dessin. Dans les deux cas, l’illusion du réel se trouve renforcée par la dimension tactile. Le graphite et les pigments à huile s’entrelacent pour mieux consentir aux grondements de la machine.

La délicatesse du dessin, la résilience du papier, ses transparences, ses épaisseurs, sa souplesse et ses tensions bâtissent un univers de l’intime, tout en force et fragilité.
Animée par les thématiques du corps, de l’enfance, du lieu, de la mémoire et du déracinement, l’œuvre de Sónia Aniceto explore le territoire invisible des émotions. Le corps et la nature sont les socles d’un langage allégorique ou se mêlent les notions d’intime et de collectif, de sentiments et sensations.

Ses œuvres évoquent le trouble lié à la recherche d’une identité à la fois perdue et en devenir. Elles mettent en scène la tension des rapports entre désir et répulsion, entre ce qui fascine et inquiète. A ce fracas d’émotions contraires vient se mêler une imagerie pleine de références à l’Histoire de Art, au corps, au lieu, à l’enfance.

Le corps est individu, fragmenté, contraint. Il s’habille et se déshabille, se joue de lui-même et fusionne avec le papier. Tandis que les paysages se laissent apprivoiser par des grilles et des structures jusqu’à l’immo bilité. Entravé, il tente au fil des dessins, d’unir l’absolu et le fragment en accompagnant le déplacement  des corps.

A son lexique habituel des piscines vides se greffe une nouvelle forme, plus abstraite, sorte de trou magné tique, de fenêtre vers un ailleurs. S’installe alors un va-et-vient entre le réel et l’imaginaire, entre conscient et  inconscient, entre figuratif et abstrait. Dans cette nouvelle série, apparaît un début d’histoire, des narrations  au caractère cinématographique et aux visages multiples, dans lesquelles la frontière entre réel et imaginaire est abolie.

Et l’image récrée le passé...

Pauline Dantonel

EXPOSITIONS